Rôti de cuisseau de veau et poêlée de crosnes à l'érable





Parce que si peu de gens transcendent le goût de l’inconnu, du nouveau, rien ne devrait nous empêcher de succomber à la tentation de l’éphémère superficialité. La fine pointe de la gastronomie est aussi visionnaire que celle de la haute couture, peut-être même plus encore. Cependant, contrairement à la haute couture qui n’a que très peu de standards objectifs autre que celui de nous vêtir, la gastronomie se doit d’adhérer à une règle selon laquelle, le goût détient une priorité indiscutable. Il y a quelques années, un petit tubercule depuis longtemps oublié, démangeaient les chefs et les jardiniers du monde entier: le crosne. Originalement cultivée au Japon, cette petite racine n’a fait son apparition en Europe qu’en 1882, dans le village de Crosnes, d’où évidement elle tire son nom actuel. Selon la société d’horticulture anglaise, les crosnes étaient très populaires jusque vers les années ’20, après quoi ils se démodèrent et tombèrent dans l’oubli, un peu comme le Burberry de la renaissance. Inlassablement décrit comme le plus étrange et mystérieux légume que la nature ait produit, on le dit aussi affreux et très difficile à cultiver. Qui a-t-il donc alors de si irrésistible à propos de l’extraordinaire crosne à $50 le kilo? Les raisons sont possiblement aussi impitoyables que celles qui nous pousseraient à acheter le blouson Gaultier dont on rêve depuis des lustres. Le crosne fait partie de la même famille que la menthe, ce qui pourrait peut-être ajouter à son sex-appeal, tout comme le ferait une veste de cuir pour un motard branché. Les feuilles du crosne sont presque identiques à celles de la menthe, seulement sans leur parfum, mais qu’importe puisque son trésor se trouve dans sa racine dont la saveur s’apparente à celle du topinambour. Le crosne n’est jamais tellement plus grand qu’un pion d’échec alors que sa couleur blanche perlée et sa forme tordue rappellent celle d’un bibendum miniaturisé. La plupart des chefs croient que le crosne ne devrait jamais être cuit en solitaire, mais plutôt en macédoine de légumes parce qu’assurément, il donnera tout son sens au plus banal des mélanges. Comme la carotte, le crosne est juteux et légèrement sucré lorsque consommé cru, fraîchement sorti du potager. Évidemment, vu son prix et sa rareté, Gaultier sera peut-être plus accessible d’ici à ce que vous ne puissiez en déguster quelques précieuses bouchées, mais tentez votre chance, sa saison s’étale d’octobre à la mi-décembre.

  • 1 rôti de cuisseau de veau (2 livres)
  • 2 cuillerées à table huile d’olive
  • Sel et poivre au goût
  • 1 oignon haché
  • 2 carottes hachées
  • ½ tasse sirop d’érable
  • ½ tasse jus d’orange
  • ½ tasse demi-glace (maison ou du commerce)
  • 4 cuillerées à table crème 35%
  • 2 tasses crosnes

Dans une cocotte ou un poêlon allant au four, faire chauffer l’huile sur un feu modéré et y faire brunir le rôti de cuisseau de tous les côtés.

Saler poivrer le rôti, ajouter l’oignon, les carottes, le sirop d’érable et le jus d’orange à la cocotte, couvrir et enfourner sur la grille du centre, à 250° pendant 1H30 ou jusqu’à ce que la température interne indique 155°.

Retirer le rôti de la cocotte et le garder enveloppé dans une feuille de papier d’aluminium pendant 15 minutes, à température ambiante.

Pendant ce temps, remettre la cocotte sur un feu modéré et la déglacer avec la demi-glace et la crème.

Ajouter les crosnes à la sauce et laisser mijoter de 5 à 7 minutes, ou jusqu’à ce que les crosnes soient tendres à l’extérieur et légèrement croquants à l’intérieur.

Couper le veau en tranches et servir aussitôt, accompagné de la sauce, des crosnes et d’autres légumes au goût.
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